Le CEMAT, le Général Schill a évoqué le besoin de disposer d’un nouvelle AMX13. Il est intéressant de voir la réflexion de nos chefs se porter sur ce type de véhicule alors qu’il est question d’envoyer les troupes françaises se battre en Ukraine. Je pense que, dans un élan de pragmatisme, le général a bien compris qu’un futur engin, comme le XLR ou le MGCS, risque fort de vivre sa vie dans les hangars de nos régiments. Par contre, il faudra un engin projetable qui puisse apporter un appui feu plus sérieux que le canon 40 mm du Jaguar.
Pour rappel, le canon de 40mm est censé être en mesure de remplacer un canon de 105mm sur le champ de bataille. Seulement, la puissance de l’obus n’est pas la même et le résultat lors de frappe n’est naturellement pas identique.
De plus, la puissance totale apportée par chaque système est largement en faveur du canon de 105 mm. L’équilibrage avec les missiles pour le Jaguar reste limité avec seulement 4 missiles mais surtout, il est financièrement coûteux pour des cibles de faible valeur.
Donc, disposer d’un canon de 105 ou 120 mm dans un véhicule a l’avantage de donner bien plus de puissance à une unité.
A quoi donc ressemblera l’emploi d’un véhicule équipé d’un canon de gros calibre. Pour la norme, on peut lui donner la mission antichar. Mais, en réalité, sur les théâtres d’opérations modernes, cette mission est souvent confiée à d’autres systèmes (artillerie, missiles, drones, mines, roquettes, bombes) et, donc, justifie t-il alors cette mission ? A mon sens, non. La mission qui peut alors être confiée au canon est l’appui feu direct pour la destruction de fortifications, de véhicules légers ou blindés (autres que les chars) et la lutte anti-personnels.
C’est justement la polyvalence du canon et sa capacité de tir direct (ou indirect) qui font son intérêt. Ainsi, nous avons une nouvelle perception, différente de celle qui a justifié la production du Jaguar et qui rappelle que le char, avec un canon, est une arme utile lors d’un affrontement sérieux et long
C’est le constat fait suite à l’emploi de l’AMX10RCR envoyé en Ukraine. Si les Ukrainiens ont d’abord eu la mauvaise idée d’employer le véhicule comme un char de combat en action frontale, ils ont rapidement changé la nature des missions de leurs véhicules. Comme char d’appui feu, l’AMX10RCR s’est révélé performant en tir direct comme indirect. Rapide, il profite de sa mobilité pour se mettre rapidement en position de tir et frapper ses objectifs avant de rapidement rompre le contact vers une zone abritée. L’inverseur, qui permet d’aller aussi vite en marche avant qu’en marche arrière, est fort apprécié (la vitesse de recul des chars russes ne dépasse pas les 20km/h). Les missions de reconnaissance et de flanc garde sont aussi à son avantage. Rapide, il peut apporter à un endroit une surpuissance en feu qui donne l’avantage tactique. Le seul reproche fait au véhicule par les Ukrainiens, c’est qu’il soit à roues et non à chenille, ce qui lui aurait donné une meilleure mobilité tactique, en particulier pendant les saisons froide et humide.
L’Inde, la Chine, la Turquie, l’Indonésie font partie des pays qui ont relancé des chars légers adaptés à leurs zones d’engagements. Le retour du char léger, on le voit, est un processus qui se généralise dans le monde. La raison en est le retour d’une conflictualité sur des théâtres divers et complexes qui oblige les forces de s’adapter.
En effet, comme en Afghanistan ou en Afrique, les espaces physiques (montagne, jungle, désert) imposent une adaptation des équipements aux milieux. Le gabarit du char léger lui permet de circuler plus facilement sur certaines pistes et surtout certains ponts.
Un char léger serait, pour nous, un instrument de combat fort utile pour couvrir l’ensemble du spectre des menaces. A l’exemple des Américains et de leur M10, un char léger pourrait donner une souplesse opérationnelle avec un char d’appui feu. Laissant la mission antichar à d’autre armes, le char léger pourrait être ce char employable qui manque à nos forces.
J’irais même jusqu’à dire que ce char pourrait devenir notre char principal. En effet, l’abandon du Leclerc et du MGCS ensuite pour un engin moyen de type M10 pourrait être mieux adapté à nos missions même de haute intensité. En effet, la lutte antichar n’étant plus la mission principale du char sur le champ de bataille, le char moyen ou léger pourrait être suffisant pour le combat que l’on mènerait dans le futur.
A l’image du conflit actuel en Ukraine, on peut imaginer un combat dans lequel on ferait collaborer des systèmes par rapport à leurs capacités. La combinaison drones, radar terrestre, guerre électronique et électromagnétique doit nous permettre de dessiner la position des forces ennemies. Les drones d’attaque, l’artillerie, les missiles effectuent les frappes longue distance. Les mortiers et les missiles du Jaguar usent les forces ennemies et neutralisent les blindés. Les chars légers avec leur canon neutralisent les fortifications et les fantassins. Les tâches étant ainsi réparties, le char léger, même en haute intensité, a une place à jouer.
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