Nos amis allemands

 

L’histoire a été dure avec l’Allemagne, empire européen au début du siècle dernier, l’Allemagne, à cause des deux guerres mondiales, s’est vu divisée et son espace diminué. La responsabilité de cette situation revient bien sur aux Allemands eux-mêmes qui étaient en confrontation contre les autres empires européens qu’étaient la France, la Russie et l’Angleterre. En 1945, elle est à la pointe technologique dans le domaine des chars, des missiles guidés, des avions à réaction mais toutes ces armes arrivèrent trop tard pour changer le cours de la guerre.


Si l’Allemagne a payé ses choix guerriers, les autres empires vont aussi disparaître au profit des nouveaux empires que sont les États Unis et l’Union soviétique. Après-guerre, la course à l’atome va bouleverser la notion de puissance en passant de l’infiniment grand à l’infiniment petit. La France va se consacrer au développement du nucléaire et en devenir le leader européen. En revanche, elle ne peut pas travailler au développement des nouvelles technologies dans le domaine des missiles ou de l’aéronautique. Elle va donc, comme les autres puissances, réemployer les scientifiques allemands des programmes nazi pour rattraper son retard.

Ainsi, la France va rapidement rattraper les autres puissances dans le domaine aéronautique et va les devancer dans le domaine des missiles, en particuliers antichars et anti navires. Elle va devenir la troisième puissance spatiale. Elle va construire seule sa dissuasion avec des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins, des missiles sol/sol et des bombardiers. La France, au début des années 1980, est la 4e puissance mondiale et s’appuie sur la CEE pour être le leader de l’Europe naissante.


La Réunification et le plan Schröder

Tout bascule avec la chute du Mur entre l’Est et l’Ouest. La France réagit de manière très négative à cette nouvelle car elle est consciente du risque que peut faire peser une Allemagne réunifiée au sein de l’Europe. Elle va cependant accepter la réunification grâce au rattachement des pays européens à l’Euro. Cela évite une chevauchée indépendante du Mark et une croissance trop forte de l’Allemagne qui aurait entraîné un risque de guerre entre elle et la France.

L’Allemagne est consciente de cette situation et accepte les conditions françaises. La réunification d’ailleurs coûte tellement chère que le niveau vie allemand diminue. La France des années 90 est encore compétitive. La mondialisation et un haut taux de naïveté des élites françaises provoquent un changement de notre politique économique qui passe d’un modèle productif à un modèle consumériste. Symbole de ce changement, la réforme Aubry et les 35 heures . Dans la même période, les Allemands font un choix totalement différent avec les lois Schröder qui obligent à travailler davantage. L’Allemagne redevient la première puissance européenne.


La Revanche allemande

L’Allemagne va se construire des réserves économiques lui permettant de racheter une place de première ordre dans l’économie mondiale. Elle va ainsi prendre la première place dans les programmes Airbus puis Ariane détenus auparavant par la France. Ainsi, elle récupère les compétences perdues suite à la défaite de 1945. Grâce à un plan non écrit, elle utilise ses coopérations et ses lois sur les brevets pour reconquérir les connaissances perdues. Ainsi, pas à pas, elle reconstruit sa puissance. Sa faiblesse énergétique est contrée par une politique écologique européenne qui permet de neutraliser l’avantage nucléaire français. Les dirigeants français, aveuglés par leur européanisme, laissent faire car ils ne disposent plus des moyens de changer la destiné du pays. Ils ont, par les différents traités européens, abandonné la souveraineté nationale et donc leur liberté de manœuvre, à l’Europe.

Symbole de ce parti pris, la coopération franco-allemande sur le FCAS , le CIFS, le MGCS, le Tigre et le MAWS. Sur ces cinq programmes, trois ont été annulés par les Allemands alors que la France comptait dessus pour renouveler ses équipements. Au même moment, les Allemands, soit se sont tournés vers les Américains (dans le domaine de l’avion de patrouille maritime), soit ont privilégié l’économie allemande. La France se retrouve à courir après des solutions alternatives qu’elle puisse financer. Les hommes politiques français veulent précipiter la BITD qu’ils ne veulent plus financer, dans un pot commun européen. Il s’agit de la politique des grands groupes comme Thales, MBDA et Airbus Défense. Certes, il y a, à chaque fois, une part d’autonomie dans le domaine industriel, mais cette part se réduit petit à petit. Ses regroupements étaient justifiés par le besoin de tailles minimum sur un marché restreint de l’armement. Mais cela a engendré une uniformisation des solutions, ce qui limite ensuite les possibilités des concurrence. La part de l’autonomie décisionnelle des états se réduit et ceux-ci deviennent dépendants de ces entreprises.

Au coeur de cette stratégie, des entreprises résistent, comme Dassault aviation et son président Eric Trappier. Refusant de tomber dans le pot commun européen, l’entreprise a bloqué le programme SCAF pour empêcher les brevets technologiques de tomber au mains des Allemands. D’autres entreprises, comme KNDS avec le canon ASCALON, montrent qu’elles maîtrisent encore des technologies de pointe.

Mais les Allemands n’avaient pas dit leur dernier mot. Ils vont commencer par acheter du F35 américain pour se laisser une marge de manœuvre. De plus, ils coopèrent avec les Anglais et d’autres pays européens pour la vente d’armes. L’Allemagne reproche le manque de « docilité » française et cherche à passer outre les blocages français. Ils lorgnent sur le GCAP avec les Anglais et les Italiens avec lesquels ils ont déjà partagé l'Eurofighter Typhoon. Dans le domaine des chars, ils viennent de sortir le KF51, mais surtout le Leopard 3, le vrai char intermédiaire, en attendant le MGCS (s’ils arrivent à le sortir un jour). Avec ce char, les Allemands font travailler toute la BITD allemande. Ils introduisent un nouveau moteur hybride, une tourelle télé-opérée, une nouvelle protection active, mais surtout le canon de 130mm. Ainsi équipée, l’Allemagne cherche à imposer le calibre allemand au dépend de la compétition du programme MGCS sur le meilleur choix. La France va se retrouver seule avec son 140mm sur le marché européen noyé par le 130mm allemand.

Cette volonté de disposer de ce char est le signe que l’Allemagne ne veut pas se laisser enfermer dans le programme MGCS et dans la coopération avec la France. Si le programme MGCS ou SCAF s’en retrouve arrêté, c’est l’ensemble de la coopération entre les deux pays dans le domaine qui sera interrompu.

Dans ce cas de figure, la France se retrouvera à financer seule deux nouveaux programmes majeurs. Aura-t-elle les ressources pour tenir les objectifs technologiques des programmes ou devra-t-elle revoir ses ambitions à la baisse ? Pire devra-t-elle admettre l’échec économique et acheter sur étagère un char européen, c’est à dire un char allemand ?


Contrairement à ce que ces quelques lignes pourraient laisser penser, l’attitude allemande ne relève en aucun cas d’un complot pour affaiblir la France, mais est on ne peut plus logique. L’Allemagne et ses dirigeants travaillent pour l’Allemagne. Sa vision européenne ne doit servir que ses intérêts. A l’inverse, la France a des dirigeants qui expliquent qu’il existe une « souveraineté européenne », c’est-à-dire qu’ils mettent tous les peuples européens au même niveau et leur accordent la même attention. A vouloir être plus européen que les Européens, la France perd au fur et mesure sa puissance pour se fondre dans cette Europe. Au contraire, l’Allemagne se bat pour défendre les intérêts allemands d’abord.

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