Vaincre selon SUN TZU : les Débuts

 


Environ 500 ans avant JC, à  l’époque des royaumes combattants, un grand chef de guerre veut se  mettre au service du roi Qi. Le roi le reçut et lui demanda pourquoi il lui donnerait son armée. Sun Tzu expliqua qu’il était le meilleur général mais le roi n’en fut pas convaincu.

 Sun Tzu proposa au roi de le mettre à l’épreuve. Le Roi lui dit alors que s’il arrivait à commander son harem de concubines, il lui donnerait son armée. Sun Tzu dit à la première concubine, la favorite du roi,  de commander la petite troupe du harem. Les concubines se mirent à rire de l’ordre qu’elles venaient de recevoir.

 Loin d’être déstabilisé, Sun Tzu expliqua qu’il comprenait leur réaction car son ordre n’était pas clair. Il changea donc de narration et leur  ordonna de nouveau  de manœuvrer toutes ensemble. La première concubine toujours méprisante rit de nouveau.

 Sun Tzu expliqua que, comme l’ordre était clair mais que la personne ne voulait pas obéir, il fallait éliminer la concubine. A la surprise du roi, Sun Tzu ordonna de décapiter la 1ère concubine et la remplaça par la seconde. Toutes les concubines qui avaient assisté à la scène furent prises de terreur et, aux ordres de Sun Tzu, exécutèrent les manœuvres militaires. Le roi ravagé par la mort de sa préférée, donna néanmoins son armée à Sun Tzu. Il ne le regrettera pas car, sous le commandement, de celui-ci, son royaume devint le plus puissant.

Alors que retenir de cette histoire ?

 Un chef, qu’il soit politique ou militaire, s’il veut réussir, doit dépasser son statut initial. Beaucoup d’hommes arrivés à un niveau certain de responsabilités, ont vu dans leur fonction un aboutissement, un signe de réussite. Il leur est arrivé d’oublier pourquoi ils étaient à cette place. Le service est la chose essentielle qui dépasse le statut. C’est la seule chose qui peut le rendre plus grand.

Le général De Gaulle, par exemple, a su trouver la force d’aller au-delà de la simple exécution des ordres pour servir la France. Il aurait pu, comme beaucoup d’autres, se mettre aux ordres du pouvoir politique alors en place. Il aurait été en accord avec les textes et les règlements. Mais servir, c’est aller plus loin que l’obéissance, c’est faire sienne la cause nationale.

Son propre caractère peut être une force ou une faiblesse. Répéter à qui veut l’entendre qu’on est le meilleur, mais refuser de se mettre à l’épreuve, est  un signe d’arrogance. C’est ce qui est arrivé à Poutine et la guerre en Ukraine. Aveuglé par la confiance qu’il avait en son outil militaire, par les compliments de sa cour, il en a oublié qu’il y avait un adversaire à vaincre.

Etre capable d’avoir du recul et de l’auto-critique est la force des grands chefs. Le plus dur dans la vie pour un homme est d’admettre ses erreurs. Il est souvent plus facile d’en rendre l’autre responsable. Mais celui qui sait se regarder en face et réagir, lui peut changer la situation et la retourner à son avantage. Dans l’histoire moderne, il n’y a que peu de retournements stratégiques qui ne soient pas aussi marquants que celui de Staline. Homme de fer qui a emprisonné la moitié de son pays et affamé l’autre partie, il se fait complètement surprendre par l’invasion allemande. Ne voulant pas assumer ses erreurs, il condamne et fait fusiller tous les hommes qui se replient. Il commande avec maladresse, pensant faire mieux que ses généraux. Après de multiples échecs, il admet ses erreurs, appelle tous les  popes (du moins, ceux encore vivants) pour bénir toutes les armes et les soldats qui partent faire la guerre. Il laisse le commandement à son état-major composé de chefs compétents et favorise la montée des généraux les plus efficaces. Ce retournement sauve l’URSS d’une défaite. Hitler fera exactement l’inverse, ce qui lui coûtera la défaite et la mort.

Enfin, la détermination ne doit pas être vue comme un signe de suffisance. Elle est la résolution de la volonté pour atteindre ses fins. La guerre, quelque soit la forme qu’elle prend, est une chose sérieuse et il ne faut, en aucun cas, la prendre à la légère. Avoir, en théorie, la capacité de vaincre rapidement  et facilement ne veut pas dire qu’il ne faille pas hésiter à s’engager dans un conflit.

George W. Bush et ses partisans en ont fait l’amère expérience lors de l’intervention en Irak, convaincus qu’ils étaient que la guerre était déjà gagnée et qu’il n’y avait pas de raison de ne pas la faire. Seulement une fois les opérations initiales terminées, les trois erreurs dues à l’arrogance que furent la dissolution du parti Bass, la privatisation des entreprises irakiennes et la dissolution de l’armée fédérèrent le peuple irakien contre les Etats-Unis. 

Au contraire, lors de la Guerre du Vietnam, les communistes vietnamiens ont fait preuve de beaucoup de détermination. En effet, ils étaient allés jusqu’à calculer le nombre de morts « acceptables » par an par rapport à la natalité du pays pour être sûrs de ne jamais manquer de combattants. Une telle détermination, alors que la différence technologique avec les Américains était si grande, est un facteur important qui a permis au Viet Min de gagner contre deux grandes puissances occidentales.

Sun Tzu offre, certes, une vision de son temps mais celle-ci peut, à chaque instant et partout, être valide pour notre époque. S’il ne faut plus tout prendre au mot dans le texte, comprendre sa philosophie peut encore nous être utile aujourd’hui.  



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