Le Char l'arme des 1000 derniers mètres (3)



Dans les parties 1 et 2 de cet article, j’ai expliqué la nécessité de modifications des chars modernes. Cette assertion s’appuie sur la multiplication des menaces nouvelles qui passent avant la menace char, l’importance de la notion de production et de pertes qui se répercutent sur la vision du char dans nos espaces informationnels (militaire, comme politique). De plus, il faut aussi prendre en compte une nouvelle répartition des fonctions dans l’espace de bataille.



Aux missiles, drones et artillerie, la lutte antichars, et aux chars, l’appui feu direct et l’exploitation. Cela a des conséquences sur la nature même du véhicule. Plus besoin de vitesse élevée

pour le tube car la fonction principale n’est plus la lutte antichars avec des munitions flèches. Plus besoin non plus de lourd blindage anti flèche sur l’arc avant, mais une protection plus globale contre les charges creuses.



Le choix américain du M10 Booker est en cela intéressant. Le char a été choisi en raison d’un risque technologique limité. Beaucoup de composants existent déjà. Le char reprend la conduite de tir et l’agencement du personnel du M1 Abrams. Il utilise le châssis de l’ASCOD 2 de General Dynamics. Technologiquement, peu de risque. Le canon choisi est un canon alléger de 105mm conçu à la fin des années 1970 pour le programme de char léger. Polyvalent, il peut traiter la majorité des cibles sur le champs de bataille, à l’exception de l’arc frontal des chars lourds.



Le choix américain ressemble à celui du M4 Sherman de la Seconde guerre mondiale. Polyvalent, simple à produire et d’emploi, le char M4 a été la monture blindée des Américains et leur a permis de vaincre leurs adversaires sur tous les fronts.



J’ai déjà exposé dans d’anciens articles l’utilité d’un char plus léger et polyvalent pour notre armée. Remplacer le char Leclerc par un char léger d’appui feu direct n’abaisserait pas notre niveau face à nos compétiteurs.

En effet, un véhicule de ce type engagé dans un conflit de haute intensité pourrait pratiquer 98% des missions actuellement réalisées par les chars. Les 2% restant sont constitués par le combat de duel anti chars, mais qui reste très rare.



Engagé dans une action offensive dans des détachements d’assaut, le char appuierait de son feu canon les groupes de combats qui attaquent. Puis, une fois la percée effectuée, le char pourrait ouvrir la voie à une manœuvre beaucoup plus mobile d’exploitation, grâce à sa capacité de feu en roulant. Travaillant en collaboration avec les autres systèmes ( antichars, drones, infanteries, artillerie, aériens etc), le char aiderait au retour de la manœuvre dans le combat.



Si j’avais à décrire à quoi ressemblerait ce véhicule plus léger, je dirais qu’il aurait un air de M10 Booker. Je suis, en effet, adepte du moteur à l’avant, mais surtout de la possibilité d’une porte à l’arrière. La masse de l’engin nécessiterait un moteur moins lourd et moins consommateur que les moteurs actuels augmentant de fait leur autonomie. Le train de roulement serait à chenille souple avec suspension oléopneumatique. La tourelle à l’arrière centre serait de deux places, car il faut quand même profiter de notre compétence dans le domaine du chargement automatique de nuque de tourelle. Les doubles viseurs panoramiques de type PASEO permettraient une surveillance plus élargie et un tir plus rapide. Le canon pourrait être un canon de 105 mm. La possibilité de disposer d’un grand panel de munitions est aussi une qualité du calibre. Il faut une protection contre le 30mm, mais aussi une protection complémentaire contre les attaques à la charge creuse (possibilité de protections actives et réactives), comme celle conçue pour le VAB mk3, le SMART-PROTech d’IBD.



Mais, on peut imaginer quelque chose de plus ambitieux, comme un char à tourelle télé opérée avec équipages en châssis. La technologie permet d’avoir un char 2 hommes. L’armement pourrait se limiter à un 120 mm 44 calibre (comme le Merkava ou le M1), avec le frein de bouche de l’ASCALON.

Dans tous les cas, la tourelle porterait en nuque le chargement automatique (14 ou 16 obus) en nombre limité, pour éviter la destruction généralisée de l’engin. une protection collaborative et un système d’informationnel des systèmes collectifs SCORPION. Le char ainsi équipé se verrait affecté un objectif puis retournerait se camoufler (mode « hit and go »). La motorisation serait hybride (motorisation électrique avec générateur thermique). Léger, discret et rapide, le char serait un engin « frappeur » apte à la guerre de haute intensité par la facilité de production, de mise en œuvre et d’entretien.



Ainsi, le char intégré dans une unité interarmes appuierait l’assaut de l’infanterie par des feux directs. Le char ouvre des brèches dans les murs, met en place des écrans de fumée pour masquer la progression. Il détruit les points d’appui et neutralise par des feux la riposte ennemie. L’infanterie, sous la protection de ce char, limite les pertes et conquiert de l’espace. Dés qu’un intervalle est trouvé, le char l’exploite grâce au feu mobile.



En conclusion, je dirais qu’il existe de multiples manières d’imaginer nos armes et nos armées. Le problème du coût des équipements, depuis la conception du char, en passant par l’achat, le soutien et l’entretien fait qu’il est difficile d’envisager l’entrée en service d’un nouvel engin. Le changement tactique des nouvelles armes n’est pas une révolution en soi. Cela a déjà existé à la fin de la Deuxième guerre mondiale, avec la bombe nucléaire. L’on s’est, à cette époque, également posé la question du rôle du char. Malgré cela, il est resté le système de combat principal des armées terrestres. Le char est encore l’arme la plus à même d’amener du feu sous protection sur tout type de terrain pour « éteindre chez nous et allumer le feu chez l’ennemi » .





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