Il y a, dans le domaine technologique, deux principales
méthodes pour décrire l’évolution de l’armement : la méthode linéaire et
celle de la révolution.
La méthode linéaire s’appuie sur l’évolution technologique
pour décrire la progression technologique d’un matériel. On parle alors de
génération. Pour les chars, par exemple, nous en serions à la quatrième
génération alors que les avions abordent la 6e génération.
Tout ceci ne révolutionne pas l’engin en lui-même dans sa
fonction, mais il dispose, à chaque fois, de nouvelles capacités qui
l’améliorent par rapport à la génération précédente. Par exemple, les premiers
MBT d’après-guerre ont été remplacés par une deuxième génération qui voit la
vitesse, la conduite de tir et la protection s’améliorer et ainsi de suite.
Le MGCS est, en fait, juste une évolution, certes très
moderne, du char de bataille que l’on connaît aujourd’hui et qu’il croisera
certainement à l’avenir.
La révolution, quant à elle, consiste en l’arrivée d’une
technologie qui change complètement la manière de faire la guerre. Le fusil à
répétition, la vapeur mais surtout le moteur à explosion interne, ont
bouleversé l’art de la guerre, rendant la manœuvre « napoléonienne »
caduque.
Le paradoxe est que souvent, une technologie révolutionnaire
n’est pas perçue comme telle par les dirigeants en place en raison
principalement d’un certain conformisme. Pourtant, le premier à savoir utiliser et mettre en
œuvre ces fameuses technologies bénéficie à coup d’un avantage sur son
adversaire.
Les drones MALE, par exemple, font partie des révolutions qui n’ont pas été
immédiatement perçues comme telles en France en raison d’un conservatisme de
l’armée de l’air et de soucis éthiques qui ont empêché la mise en place
d’armements sur ce type de système.
Même si une évolution est pressentie, elle peut prendre du
temps pour des raisons économiques et industrielles. Le drone NEURON était une
machine à la pointe de son temps, mais elle n’a abouti à aucune commande.
On voit aujourd’hui tout l’intérêt de la mise en place de
robots terrestres pour augmenter le volume de nos forces mais, là encore, les
projets ne sont pas actuellement au niveau demandé. L’investissement est
embryonnaire alors que ces équipements doivent prendre une place importante
dans la transformation de nos armées.
Si la technologie donc peut provoquer des ruptures, leur
utilisation a surtout des conséquences sur des programmes linéaires. La mise en
œuvre d’avions à partir de porte-avions a mis fin à la suprématie des
cuirassiers comme « capital ship ». On peut penser que les trois
révolutions en cours que sont les drones, la numérisation et la précision
rendent désuète toute évolution de certains de nos équipements comme les chars.
Cela nous impose de nous adapter et pas forcément comme nous
le pensions. L’armure en métal des chevaliers apparue sous forme de côte de
maille au début du Moyen-âge va évoluer avec les améliorations de la
technologie de production du fer puis va subir sa première grande rupture avec
l’apparition des armes à feu qui permettaient à un soldat faiblement entraîné
d’abattre un chevalier en arme à distance.
Cependant l’apparition des armes à feu ne sonna pas le glas
de l’armure. Celle-ci se transforma pour gagner en mobilité et en légèreté. Les cuirassiers et
autres hussards dominèrent le champ de bataille avec leurs armures grâce à de
nouvelles techniques de combat (l’emploi d’une lance cassable et une charge
très courte permirent au hussard polonais de gagner bien des batailles
jusqu’aux XVIIe siècles). Surtout, les chefs militaires comprirent très tôt
l’importance des effets et donc l’importance de l’association des armes dans la
bataille. Ainsi Les cuirasses ne servaient pas à protéger des balles mais du
coup des armes blanches fixant la fonction de l’arme au choc de préférence
latérale (grâce à la mobilité de l’arme de cavalerie). Cela ne cessa qu’avec
l’apparition des fusils à répétition aux XIXe siècles, près de 5 siècles après
le premier emploi de la poudre sur un champ de bataille.
Paradoxalement, l’armure continue à exister avec les gilets
pare-balles modernes et des plaques de céramique. Cet exemple sert surtout à
nous montrer qu’un armement peut et doit s’adapter et qu’il peut continuer à
jouer un rôle pourvu qu’il sache suivre une autre évolution linéaire que celle
qui était initialement prévue.
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