Les ambitions du MGCS

 


J’ai beaucoup parlé du MGCS mais en réalité, je pense que peu nombreux (à l’exception de quelque ingénieurs et militaires) sont ceux qui visualisent réellement le MGCS. Cela est dû en partie au fait que même les personnes participant au programme ne l’ont pas complètement matérialisé.

Je vais tenter ici de définir ce à quoi aurait sans doute ressemblé le MGCS. Je vais commencer parce qu’il n’aurait pas été. Il n’était pas prévu qu’il soit un char comme ceux d’aujourd’hui, il ne devait pas être une copie d’un Leclerc en mieux. Il ne s’agit pas d’une plateforme unique.

 Il doit répondre  aujourd’hui à cette question :

Que faire pour dominer le champ de bataille avec un minimum d’exposition ?

 A cette question, les ingénieurs ont imaginé un système de systèmes multi-plateformes. Celles-ci ne sont pas encore définies de manière définitive, mais elles doivent comporter une plateforme pour l’action directe, une pour l’action indirecte, une de commandement et  une de renseignement.

La plateforme directe comporterait l’armement canon de gros calibre et doit être en mesure de neutraliser toutes les menaces sur le champ de bataille. Elle dispose d’une capacité de tir indirect qui sera son mode d’action principal. L’action directe n’est qu’occasionnelle, mais possible.

La plateforme indirecte disposera d’un armement missile et/ou laser en mesure de neutraliser, par des tirs à distance, l’ensemble des menaces. Elle complète l’action de la plateforme directe (constat fait d’ailleurs en Ukraine). Pour l’instant, il n’a pas été décidé si les deux  plateformes doivent  être habitée ou inhabitée.

La plateforme de commandement est une plateforme habitée. Elle commande les autres plateformes et travaille sur une NEB collaborative comprenant les systèmes terrestres, mais aussi des autres armes.

J’ai rajouté une plateforme de renseignement (qui peut être la plateforme de commandement). Elle disposera de moyens de renseignement électromagnétique, optiques et autres, lui permettant de dé-camouflé l’ennemi et d’agir dans la profondeur avec des drones.

Le camouflage fera aussi partie intégrante du concept, comme d’ailleurs la protection collaborative. Un concept comme CAMELEON permettra de rendre presque invisibles les véhicules.

A noter que, pour l’instant, tout ceci n’est que spéculatif.

Il y aura aussi une marsupialisation des plateformes. Un robot terrestre va, par exemple, embarquer un drone qui va soit renseigner, soit attaquer un objectif. Cela va permettre de mettre à distance les opérateurs de tout risque d’attaque ENI.

La robotisation des plateformes permet de les alléger. En effet, sans personnel à protéger, il n’est pas nécessaire de mettre de lourds blocs de protection. L’intensification du tir indirect dans la zone de combat optimise l’importance du camouflage.

Il est possible d’imaginer des plateformes légères de petite taille qui compense par leur discrétion et  leur camouflage, leur manque de blindage.

Cette mise à distance des opérateurs va permettre un combat plus audacieux. En effet, moins craintif pour la vie ou la mort d’une plateforme, il sera possible de s’engager dans un combat plus long et risqué.

Il est aussi possible d’imaginer moins d’opérateurs. En effet, loin, comme aujourd’hui, de devoir guider pas à pas chaque robot, demain il sera possible de gérer plusieurs robots  en même temps. L’amélioration d’une vision numérique du champ de bataille permettra à l’opérateur de faire manœuvrer son peloton de robots et lui affecter des objectifs à détruire.

Pour cela l’opérateur pourra soit utiliser ses drones de renseignement, soit les optiques de ses robots ou les informations de la  NEB interarmées multi domaine. Travaillant en complémentarité de manière collaborative entre elles et avec d’autres plateformes terrestres et aériennes, le système doit fournir toutes les informations nécessaires à la réussite de la mission. 

De plus, on peut imaginer aller plus loin dans cette logique avec l’intégration d’autres acteurs comme des robots du génie, de défense sol air, de brouillage, de secours etc.. Il sera ainsi possible de multiplier les possibilités et de s’adapter encore plus rapidement à la mission.

Avis personnel

Je pense personnellement qu’il faudrait travailler sur la réduction des personnels devant gérer les robots et drones. En effet, actuellement un robot est géré par deux personnels : un pour le pilotage navigation et l’autre pour la gestion des feux ou de la mission. L’avantage apporté par l’utilisation d’un robot est faible, voire inexistant, car il faut plusieurs opérateurs spécialisés. Le premier défi est de passer à un opérateur puis un opérateur pour deux, voire plus de robots.

Je pense que pour y arriver, il faut créer un espace de manœuvres virtuelles reproduisant le terrain pour travailler. L’intérêt est que dans cet espace virtuel, les ordinateurs peuvent travailler plus facilement ensemble. L’opérateur, lui, pourra jongler entre espaces virtuel et réel. L’intérêt pour l’opérateur est de pouvoir préparer sa manœuvre (voire de l’exécuter) virtuellement avant de la jouer en situation réelle.

L’incrémentation d’informations venant de l’espace numérique commun (internet interarmes/ armées multi domaine) sera aussi plus facilement gérée sur l’espace de manœuvre virtuel. L’information sur des objectifs possibles est partagée entre les différentes plateformes comme par l’opérateur.

De plus, à l’image d’ATLAS, américain, le MGCS doit disposer de senseurs intelligents en mesure d’identifier une cible et de faire une séquence de tir sur elle. Il doit être en mesure de se déplacer à minima en autonomie grâce, en partie, à un déplacement virtuel. Je m’explique : le robot n’interagit  pas dans le réel, mais dans le virtuel. Pour cela, un des drones de reconnaissance devra scanner la nature du terrain ou au moins en définir les principaux obstacles. Une fois l’information virtualisée, les robots pourront se déplacer plus rapidement en limitant les risques de bloquer sur un obstacle. Cette mission de renseignement peut être effectuée par d’autres systèmes n’appartenant pas au système (avion équipé d’un LIDAR par exemple ou satellite).

L’opérateur tactique pourrait disposer d’un système en fusion mettant en parallèle le virtuel et le réel. Il travaillera le plus souvent sur une vision en hauteur de son champ de bataille lui permettant de rapidement analyser les informations.

Démonstration

Une mission vient de tomber pour le MGCS. L’opérateur tactique la reçoit et le système lui propose toute suite la mission de son unité et sa mission propre. Il peut alors visualiser virtuellement le terrain d’action, marquer virtuellement les zones dangereuses, les zones à surveiller, en particulier, les points de passage obligé etc.  Ensuite, il peut, si le temps le lui permet, jouer la mission virtuellement pour tester sa tactique. Dès qu’il a reçu l’ordre d’avancer, il fait exécuter sa mission à chaque robot et drone conformément au jeu joué. Les informations alors arrivent de multiples senseurs du système ou senseurs externes sur la présence d’ennemis ou d’obstacles. Il donne alors de nouveau ordre à chaque plateforme, soit de manœuvrer, soit de détruire. La protection collaborative permet un appui permanent par les autres systèmes en feu ou en renseignement.

Une menace hors de vue apparaît sur l’écran. En cliquant sur celle-ci, il en apprend la nature et le choix de l’arme pour la détruire. Il aura d’ailleurs plusieurs options, mais la première est la plus pratique et économique, car il doit gérer son stock d’armement. Par exemple, si la menace est un groupe de fantassins, il peut employer, soit un drone, soit un missile, soit un tir direct au canon. La solution la plus économique est le coup de canon, car il y a plus d’obus que de missiles ou de drones.

L’opérateur place ses robots et ses drones de telle manière qu’il reste en liaison et qu’il couvre le plus d’espace possible. L’ENI peut toujours nous surprendre (principalement en zone urbaine) : il faut donc une automatisation de la protection (un APS) et du renseignement (capteurs sonores ou thermiques etc.) permettant de faire remonter l’information à l’opérateur qui, soit aura autorisé un tir libre, soit prendra en mains les feux de riposte en cliquant sur la cible et en choisissant le moyen de neutralisation.

L’opérateur pourra aussi disposer de choix de formation pour ses plateformes (colonnes, batailles, losanges, abri, formation masquée etc.). Il pourra donner des missions particulières et repartir faire autre chose ailleurs.

Par exemple, lors d’une mission « reconnaître », il envoie un drone faire une reconnaissance de zone. Pendant ce temps, il va envoyer un robot en appui en vue d’un franchissement. Il clique droit avec la souris sur son robot. Apparaît alors une liste de choix de missions. Il sélectionne la mission « appui », clique à l’endroit où doit s’exécuter la mission et choisit l’itinéraire à emprunter.  La mission donnée, le robot n’attend plus que l’ordre « en avant ». L’opérateur clique sur le robot virtuel : la liste de choix s’est réduit et il choisit « en avant ». La mission commence.

Pendant ce temps-là, le drone, qui avait été envoyé en reconnaissance, transfert  les images au système.  Grâce à une AI de type ATLAS, celui-ci  repère deux véhicules avec des personnels. L’information est automatiquement transféré sur le réseau. Le chef de l’unité demande alors un feu mortier pour détruire les menaces et pour ne pas dévoiler son dispositif. Tout ceci se passe en même temps et sans même l’intervention de l’opérateur tactique. Travaillant ainsi, le MGCS devrait dominer le champ de bataille du futur.

Le MGCS possèderait en outre d’autres capacités comme le brouillage, le camouflage la prise en compte d’élément collaboratif.

Par exemple, le MGCS pourrait se voir intégrer une plateforme génie pour le déminage. En échange, un des robots pourrait partir en appui d’un MGCS génie. La collaboration est native au système et permet aussi de restructurer ou renforcer une unité MGCS. En effet, les drones ou robots perdus ou détruits pourraient être remplacés facilement, permettant la résilience de l’unité.

En conclusion

Je dirais que la vision du MGCS est aujourd’hui particulièrement trompeuse pour bien des experts comme des novices. Les possibilités offertes par le système doit permettre de dominer le champ de bataille, tout en économisant les hommes. Projet futuriste, voire avant-gardiste, le MGCS nécessite la maîtrise de nombreuses technologies pour l’instant encore balbutiantes. Le construire seul serait un challenge en raison particulièrement de l’effort financier nécessaire à sa réalisation. Mais, si dès 2035, la France dispose de ce genre de système, elle sera à la pointe de l’armement pendant de longues années et pourrait se garantir de multiples réussites commerciales.        

 



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