Le MGCS est en train peut être de vivre ses derniers jours (1). Je dis bien peut être
car, pour l’instant, la France est restée silencieuse face à l’assaut
médiatique allemand sur le programme FMBT, futur char qui serait fabriqué en
commun par l’Italie, l’Allemagne, l’Espagne et la Suède. Ultime atermoiement
d’un programme né de la volonté politique de faire un char européen, le
programme MGCS semble chaque jour sombrer. Pourtant, la France, plus que
l’Allemagne, semble absolument tenir à ce programme.
La principale raison de la position
française est financière : la France ne veut pas investir seule dans un
programme d’armement majeur. Le char, pour les politiques, reste moins une
machine d’emploi qu’un symbole de la volonté de tenir un rang ainsi qu’un
instrument politique d’un souverainisme européen. Le MGCS devait être le fruit
de cette volonté, mais il semble qu’il soit en train d’être sacrifié sur
l’autel des intérêts partisans.
C’est la réalité industrielle qui a d’abord fait tanguer le
navire. La propriété intellectuelle, la
volonté de mettre en avant sa BITD au dépend de l’autre, les choix
technologiques divergeants, ont creusé la tombe du programme. Puis ce furent
les militaires qui, ayant des doctrines divergeantes, ne s’accordèrent pas sur
la nature de l’engin. Enfin, petit à petit, les politiques s’en mêlèrent pour
défendre leurs intérêts nationaux.
Pourtant, le discours politique français ne changea pas, ce
qui libéra un espace de manœuvre pour les lobbies industriels allemands.
Ceux-ci firent pression sur leurs hommes
politiques et sur des gouvernements
partenaires pour littéralement chasser la France du programme de char européen.
Le FMBT est le cheval de Troie du MGCS. En effet, il va
permettre à Rheinmetall d’introduire son
canon de 130mm et d’en faire le nouveau calibre de l’OTAN. Il permet d’imposer
d’autre choix technologiques qui, le moment venu, viendront s’opposer à la
proposition française du MGCS. Il va surtout permettre de retarder le programme
de remplacement du char Leclerc prévu pour 2035 et le décaler jusqu’en 2045
(voire plus), nous laissant quasiment sans solution. A l’exception notable
d’acheter, en attendant, quelques FMBT…
Outre le problème financier, c’est aussi l’expérience et les
compétences technologiques que nous risquons de perdre définitivement. Une fois
perdues, il faut une dizaine d’années et de lourds investissements pour les
récupérer.
Voilà la situation actuelle. On peut se demander quel sera
le résultat de la réunion prévue le 22 septembre 2023, entre la France et
l’Allemagne (2) .
Cette rencontre devrait entériner, soit la fin du MGCS, soit au contraire
montrer la soumission de notre politique et notre industrie à l’Allemagne. Il
ne semble pas pour l’instant exister de plan B français. M. Chiva, directeur de
la DGA, a bien déclaré que la France se tenait prête à faire face à la possible
fin du projet MGS (3) mais
il n’y a pour l’instant rien de visible.
Technologiquement parlant, fabriquer un char reste toujours
à la portée de la France. Mais la question est moins technique que financière.
C’est l’argent que l’on n’a pas ; ou plus tôt que l’on ne veut pas dépenser. L’échec du MGCS
pourrait entraîner notre déclassement aux yeux de certains partenaires comme
les Etats-Unis, mais en réalité, le problème est plus complexe.
C’est moins la technologie que la compétence de notre armée
qui fera la différence et qui nous donnera notre rang à l’avenir. Il me semble
pourtant qu’un programme moins ambitieux nous permettrait tout de même de
continuer à jouer dans la « cour des grands ». Mais le
voulons-nous ?
(1) https://www.geo.fr/geopolitique/projet-char-franco-allemand-mgcs-en-passe-effondrer-suite-accord-berlin-suede-espagne-italie-scaf-216543 , https://www.challenges.fr/entreprise/defense/le-char-de-combat-franco-allemand-mgcs-au-bord-du-gouffre_866554
(2) https://www.gifas.fr/press-summary/mgcs-des-tensions-a-l-approche-d-une-nouvelle-reunion-ministerielle-sur-le-projet-de-char-de-combat-franco-allemand-ij
(3) https://www.opex360.com/2023/09/07/berlin-porte-un-coup-sans-doute-fatal-au-projet-de-char-franco-allemand-de-nouvelle-generation/
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