La nouvelle loi de programmation 2024/2030 a fait abstraction d’un
renouvellement transitoire d’un char de combat au profit des forces armées en
raison de la volonté de privilégier la cohésion des programmes en vue de la
remonté en puissance.
En effet l’armée de terre ne
sort pas gagnante de la loi de programmation. Pourtant, il s’agit pour elle de
remonter en puissance en redonnant une autonomie à ses régiments et brigades.
Il est indispensable de trouver une solution de transition dans un environnement
international complexe. La menace d’un conflit de haute intensité
inter-étatique redevient une des menaces possibles dans les dix prochaines
années au vue de la conjoncture
actuelle.
Pourtant, il n’est pas prévu ni d’augmenter les budgets prévu, au moins à court terme, ni d’augmenter les effectifs.
Les priorités étant multiples, l’armée de terre doit s’adapter à des conditions
complexes.
Une réforme d’économie d’échelle
Dans l’histoire de France, ce n’est pas la première fois que
les armées pâtir de conditions financières difficiles. Immédiatement après la
désastreuse Guerre de 7 ans (1756-63), l’armée va subir de grandes réformes
alors que les ressources sont limitées. L’armée va voir la création de la division par Guibert, une
réorganisation de l’artillerie avec la réforme de Gribeauval et la
normalisation des calibres et des affûts. Cela va simplifier la logistique et
rendre les armées plus mobiles. Va également intervenir la première
industrialisation des armes et des uniformes d’infanterie comme le fusil modèle
1777 fabriqué en série dans les premières manufactures.
Toutes ces réformes vont servir la France dans la Guerre
d’indépendance américaine mais surtout pendant les guerres de la
Révolution et de l’empire.
Aujourd’hui, la réforme structurelle doit venir de la manœuvre
vectorielle du combat qui consiste à effectuer un combat de petite cellule
combattant à 360° interagissant les unes
avec les autres, grâce à un réseau numérisé sécurisé. La capacité d’accélérer
la phase de ciblage grâce à ce même réseau numérisé doit permettre d’effectuer
une manœuvre rapide, précise et économe.
Comme l’explique le général HUBIN, le commandement aussi
doit être réformé. Le chef de cellule sera un lieutenant qui, seul, fera de la
tactique avec une unité de la taille d’un peloton interarmes. On voit actuellement
ces formations mener des actions offensives sur les champs de bataille de Syrie
ou d’Ukraine. Elles sont constituées de 1 à 3 chars avec 3 VCI ou VTT
transportant l’infanterie avec, occasionnellement, un appui d’un groupe du
génie. Le capitaine qui commande l’échelon supérieur fait manœuvrer ses
cellules de contact avec des cellules sur une zone particulière dont il a la
gestion. Le colonel, lui, gère l’affectation des cellules de contact au
capitaine ; il gère les cellules logistiques et d’appui en vue de la
réalisation de la mission.
La structure interarmes s’impose dans les unités pour
permettre un travail coopératif au sein des unités, même en temps de paix. La
grande précision des armes, cumulée à un système d’information et de ciblage,
optimise une action brutale, rapide et économe, permettant de produire des
effets dans la durée.
La seconde réforme touche l’accès et l’anti-accès. L’armée
de terre, qui n’avait que peu de moyens de frappe dans la profondeur (13 LRU
qui frappent à 80 km), doit être en mesure d’affaiblir de manière bien plus
importante un adversaire. Il faut donc constituer des moyens de frappes dans la
profondeur plus mobiles, plus nombreux mais aussi éventuellement plus
polyvalents, avec une capacité de frappe anti-navire ou la projection d’un
champ de mine.
La capacité anti-accès passe par le renforcement de la
capacité sol-air et sol-mer. Il serait intéressant de mettre en service des
missiles anti-navires et antiaériens sur
porteur terrestre. Ces véhicules doivent être projetables par avion.
Dans le domaine naval, dans les années 70 et 80, les forces
étaient composées en majorité de petits navires (avisos, patrouilleurs) et de
sous-marins conventionnels (18 sous-marins dont seulement 1 nucléaire). Au lieu
de concentrer les efforts sur le PANG, il faudrait reconstituer une flotte de
corvettes en mesure de contrôler notre espace maritime. Il faudrait idéalement
deux porte-avions pour avoir une permanence à la mer. Il est également possible
d’imaginer un choix plus audacieux avec 3 ou 4 porte-drones qui permettraient
de couvrir plus d’espace à moindre coût. La reconstitution d’une flotte de
sous-marins conventionnels est aussi un chemin à prendre pour densifier des
capacités de contrôle, de lutte anti-sous-marine, de renseignements navals ou
terrestres. Cela pourrait en partie être compensé par un grand nombre de drones
sous-marins.
Dans le domaine aérien, un super Rafale, en gardant le même tonnage que l’actuelle
version, pourrait, avec des drones de type Neuron, constituer un tampon entre
la 5e génération et la 6e génération, en attendant un
hypothétique SCAF. La guerre aérienne en Ukraine a d’ailleurs montré
l’importance du tir air-air longue distance. La collaboration entre des
antennes longue portée passive ou active et le super Rafale, qui dirigerait à
son tour son drone de type Neuron porteur d’un missile longue portée,
permettrait d’abattre des avions loin dans la profondeur de la défense ennemie.
Il faudrait le renouvellement d’une capacité
SEAD (Suppression of Enemy Air Defenses) en vue de frappes dans la
profondeur.
Agir dans la profondeur, accélérer la manœuvre, frapper
juste et fort, agir partout sont les concepts qui doivent permettre de dominer
l’adversaire pour la défense de nos intérêts et nos espaces maritimes et
terrestres.
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