LE PROBLEME DE LA BASE INDUSTRIELLE DE DEFENSE
Pourquoi aujourd’hui avons-nous tant de mal à faire démarrer
notre base de défense pour construire un futur char de combat ? Les
raisons sont multiples et en voila les raisons.
Pré-requis pour la construction d’un char.
L'expérience technologie est nécessaire car elle
permet de ne pas partir de zéro. Celle-ci tirée de l’histoire technique ainsi que la
transmission des compétences permettent de facilité la conception d'un engin.
Ensuite, il faut des ingénieurs qui prennent en compte non
seulement les connaissances du passé, mais aussi toutes les possibilités du
présent et du futur. Ils faut maitriser le domaine des technologies militaires liées à
l’armement mais aussi à celui de la mobilité,
des communications, et aussi de la
production. L’arrivée des nouvelles technologies de production (production
imprimante 3D, soudage par friction etc..) cumulée à de nouveaux programmes
virtuels comme le double numérique permet d’accélérer la conception des
véhicules complexes.
Troisièmement, il faut des matières premières et des composants. Soit ces
matières sont produites au niveau national, mais elles peuvent aussi venir de
pays amis. Il faut être sûr de ces approvisionnements et ne pas risquer de se
retrouver en difficulté. il est important de prendre en compte qu’il n’y aura pas de
limite à la vente de ces produits.
Il faut ensuite des industries disposant des technologies de
production. Leurs équipements doivent être suffisamment nombreux et productifs
et surtout capables de produire les pièces pour le soutien du véhicule pendant
toute sa durée de vie. Il faut de plus disposer des techniciens qui puissent
utiliser ces machines et que leur expérience ne disparaisse pas.
Enfin, le nerf de la guerre, couvrant l’ensemble du spectre,
est l’argent. Sans argent tout ce qui
est cité précédemment ne sert à rien. Pour avoir les budgets, il faut de la
volonté politique. Le politique n’estime l’effort financier consenti qu’à
l’aune des dangers à affronter.
Malheureusement, on ne peut pas répondre à l’ensemble de
tels besoins en un ou deux ans. Des années d’effort sont nécessaires pour qu’un
programme d’armement aboutisse.
Les Problèmes actuels
En 1991, la chute du Mur de Berlin a entraîné la
transformation de la BITD (Base Industrielle de Technologie de la Défense). La
fin de la menace venue de l’Est a eu pour conséquence la réduction de la
demande en équipements militaires. Le choix se porte alors vers la haute
technologie, c’est-à-dire, avant tout, des programmes échantillonnaires ayant
pour conséquence une réduction des productions industriels. Les entreprises
réduisent les effectifs de personnels et perdent certaines compétences. Les
programmes s’échelonnent et se succèdent au fur et à mesure du vieillissement
des équipements.
Au tournant des années 2000, il y a eu
des retards dans le remplacement de tous les véhicules médians. Les commandes
de l’état sont reportés et les budgets sont au plus bas. La première crise
ukrainienne de 2014 réveille les états sur le risque de retour d’un conflit
interétatique. C’est à partir de ce moment qu’un effort budgétaire est
consenti.
Mais les retards pris sur certains programmes vont se
superposer avec le remplacement d’autres équipements. Les budgets n’étant pas
extensibles, des retards de production ou de changement de programmes
ralentissent le remplacement des véhicules anciens qui sont actuellement à bout
de souffle.
Les ingénieurs comme les techniciens sont en nombres limités
et les compétences ont été partiellement perdues en raison du départ à la
retraite des personnels qui ont travaillé sur la génération précédente.
Le besoins industriels étant réduits, les matières premières et les composants ne sont plus nationales mais souvent partagées avec d’autres partenaires. Les
politiques doivent choisir des coopérations pour pouvoir disposer d’armements
complexes, en partageant les efforts budgétaires.
Le Retour de la conflictualité
La guerre de 2022 en Ukraine a révélé toutes les faiblesses
de notre industrie de défense. En effet, la volonté de soutenir les Ukrainiens
dans une guerre de haute intensité a mis en évidence le manque d’investissements
depuis 30 ans. Les stocks n’ont pas permis de couvrir les besoins. La guerre en
Ukraine a aussi révélé que nous n’étions pas non plus capables de tenir notre
rang de grande puissance.
Il y a eu dans toute l’Europe une volonté de rapidement se
réarmer. Mais on a alors vu que lorsqu’il s’agit d’armement, c’est chacun pour
soi. Cela a provoqué des
difficultés dans les chaînes de production (à l’exemple du canon CAESAR), car
le rythme de production des temps de paix ne correspond plus à celui demandé
aujourd’hui.
L’industrie de défense a dû entrer en « économie de
guerre ». Il a fallu engager des personnels, rechercher des matières
premières, voire rapatrier des usines de production. Il a fallu faire une
prospection sur les personnels et les industries « hors BITD »
mobilisables pour l’effort de guerre. Des efforts de modernisation de l’outil
de production ont été exigés, avec la mise en place de nouvelles chaînes de
production.
Le paradoxe de la situation est que si la BITD s’est mise en
ordre de marche, les politiques, eux, font
la même erreur dans les années 30 ; ils ne font pas de commandes.
Sans commande, pas de production. La Loi de programmation militaire 2024-2030
ralentit au contraire le rythme de livraison de nouveaux équipements et
prolonge leur date de fin de livraison, ce qui rend plus complexe la production
d’un nouvel engin actuellement.
La production d’un nouveau char, surtout en nombre aussi
limité, n’est pas financièrement intéressante. Seule la perspective
d’exportation pourrait permettre de lancer un programme national. C’est pour
cela que le ministre de la Défense a lancé une commission pour évaluer le
besoin en chars neufs dans le monde et donc les éventuels marchés. Il serait intéressant
de créer un nouveau « Rafale » ou « CESAR » qui serait un
nouveau succès commercial.
C’est seulement après cette évaluation que pourra
éventuellement se concrétiser le lancement d’un programme intermédiaire de char
de combat. Ensuite se posera la question de savoir quand, comment, et par qui
produire ce char.
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