Le CARMEL le char de l’avenir ? (20/12/2020)

 

Le CARMEL le char de l’avenir ? (20/12/2020)




Lors de la guerre de 2006, Israël a perdu 61 chars Merkava de tout model lors d’affrontements avec le Hezbollah. Tsahal a réagi en améliorant la formation des équipages, en préparant les échelons supérieurs à des engagements beaucoup plus durs. Elle va aussi modifier sa logistique qui avait été déficiente. Elle a repris des manœuvres de niveau division (abandonné en 2000) et lancé de vastes mesures de modernisation des équipements terrestres.

La mesure la plus visible fut la généralisation du système Trophy sur l’ensemble des véhicules qui auraient l’opportunité d’être en contact, le remplacement des M113 par un nouveau véhicule plus mobile à roue (l’Eitan) et le développement d’un nouveau véhicule censé remplacer le Merkava, le Carmel.

En 1973, les Israéliens sont en difficulté car ils ont eu beaucoup de pertes lors des batailles de chars. Grâce au soutien américain, des renforts en matériels ont permis de poursuivre le combat et de gagner la guerre. A l’issue de la guerre, les Israéliens réagirent en disposant de réserves importantes de chars. C’est pour cela qu’ils disposent de 2 600 chars dont la majorité constitue les stocks de réserve.

Mais les garder opérationnels a un coût. De plus, la situation internationale a changé. L’Egypte et la Jordanie ont reconnu Israël. La Syrie ne représente plus une menace depuis qu’elle a perdu le soutien soviétique.

Récemment la politique des pays sunnites envers les Israéliens s'est normalisée grâce à la position israélienne sur l’Iran.

Il n’y a plus de risque d’invasion directe du pays et les Israéliens sont en mesure de réagir car ils se sont dotés des équipements les plus modernes de la région.

L’expérience militaire s’est faite lors du conflit au sud Liban et de l’Intifada palestinienne. C’est un combat principalement mené contre de l’infanterie légère installée en défensif et qui optimise les nouvelles technologies d’aujourd’hui.

Il apparait que le choix d’abandonner le char est une surprise mais révèle une perception du futur beaucoup moins linéaire.

En effet, avec l’arrivé du T14 , il semble qu’une course aux armements soit relancée et en particulier dans le domaine du char. Les pays émergents et les grandes puissances se sont lancés dans la recherche et le développement de programme en vue de remplacer les générations précédentes de chars.

Les Israéliens sont à l’image des sociétés occidentales, sensibles à la perte d'autant plus que  sa population est largement inférieure aux peuples arabes voisins. Sa population est, comme les populations occidentales, ouverte aux nouvelles technologies et aux technologies de l’information. Mais la perception de l’environnement politique international est différente en Europe, les conflits sont plus lointains, ce qui complexifie la perception du danger et de la nécessité de s’en protéger.

Les Israéliens ont choisi une stratégie qui consiste à mettre à distance les menaces. Pour cela, ils ont défensivement mis en service les systèmes Iron Dome et Arrow qui doivent protéger des frappes terrestres. Ils ont également défini une stratégie de combat à distance avec les drones. Observant et frappant à distance, les drones évitent la confrontation directe. Le choix de moyens moins sophistiqués mais plus nombreux permet de submerger les défenses même les plus modernes. Ainsi, les Israéliens ont appliqué des frappes contre la Syrie et détruit un certain nombre de système sol-air.

On a surtout observé ce changement chez les Turcs et les Russes. Lors de l’intervention en Syrie contre les Kurdes, ou en Lybie, les drones ont remplacé les avions dans les missions CAS. On peut dire que les drones remettent en cause la supériorité aérienne classique. Les frappes ont permis de détruire les forces qui leur étaient opposées sans subir de pertes.

L’idée de faire la guerre sur le territoire de l’ennemi est une priorité pour Israël, éviter les morts aussi. La guerre du futur portera un effort particulier sur le tir longue distance hors de portée de riposte « stand-off ».  Les armées dans le monde développent des munitions pour tirer au-delà des vues au profit des troupes au sol pour disposer de cette protection distanciée. Les missiles anti-char Spike en sont l’exemple. Le missile est développé selon le modèle de 800 m à 25km. Son action est poursuivie ensuite par les drones Kamikazes comme le Harop ou les drones MALE  qui complètent l’action en profondeur.  

De nouvelles protections

Un rapide aperçu de la guerre permet d’analyser l’évolution de la bataille au fur et à mesure de l’évolution de l’armement. Pour exemple, en 1939, le combat blindé se situe aux environs de 400m avec pour certains armements 1000 m maxi pour des calibres de 25mm au 75mm. A la fin de la guerre, les canons sont montés jusqu’à 128mm et des records ont été enregistrés jusqu’à 4000m maxi mais 2000m en moyenne. En 1967, pendant la Guerre des 6 jours, les distances ont à peine changé. Avec les conduites de tir moderne, le tir passe à plus 4000 m et de nouvelles munitions, on parle de tir à 6000m. La seule restriction est la zone d’inter visibilité de la zone d’opération. En Europe, elle est de 2500m.

Pour ne pas être dépendant de cette contrainte, on voit tout l’intérêt du tir au-delà de la vue TAVD avec missile. On peut frapper à distance et en sécurité derrière le mouvement de terrain à des distances bien plus longue que nous permet le canon. Cela procure une protection distancielle.  Mais pour se tir, il faut le renseignement indiquant ou se trouve l’objectif. L’utilisation d’un drone par le lanceur est la première solution. Cette combinaison de système optimise en boucle court le tir. Mais on peut imaginer un système encore plus efficient ou l’information est mieux partagée. La cible, un char pour l’exemple, a déjà été repéré par des moyens satellites, tracé par moyens EM voir cyber, repéré par un drone MALE ou un avion de reconnaissance. Une meilleur gestion de l’information permettrait au système lanceur de disposer de l’information nécessaire à son tir sans même qu’il ait vue sur celui-ci (même de manière indirect par drone). La quantité d’information permet d’avoir une idée très précise des forces en face de nous, cela procure une protection informationnelle.

Pour arriver à gérer et organiser cette information entre systèmes, on utilise de l’intelligence artificielle pour trier l’information à plusieurs échelons. Le premier est le capteur qui doit identifier et marquer l’objectif. Puis il faut un système qui suit l’objectif par rapport au flux d’informations données par les capteurs. Si chaque capteur repère l’objectif (par exemple un drone, un satellite, un capteur EM) chacun va définir un objectif ce qui donnera trois cibles (une par capteur). L’idéal est que les capteurs se coordonnent pour faire coïncider l’objectif. Pour cela il faut un réseau renforcé et auto communiquant. L’opérateur du système lanceur reçoit alors l’information qui lui permet d'avoir une situation tactique ami / ennemi des plus précises mais pas complètes.

Le brouillard de la guerre

 Il restera toujours des incertitudes. La menace des mines, de l’EEI, du fantassin avec armes anti-char, du véhicule camouflé  peut annuler l’avantage obtenu par les nouvelles technologies. Il y a aussi la menace qui pèse sur les systèmes d’information et de communication qui pourraient être détournés, brouillés ou détruits. Il faut donc les sécuriser si l’on veut viabiliser le système. Il faut aussi savoir être résilient dans l’imprévu. Il faut prendre en compte le facteur perte et échec causé par l’ennemi. Pendant la guerre en Ukraine,  80% des forces sont détruites avant le contact avec les forces principales. La guerre des drones en Lybie, Syrie, ou en Abkhazie montre des forces détruites sans même arriver à prendre contact. Il est donc important de disposer d’un volume de forcse qui accepte un degré de perte.

La réponse israélienne : le Carmel

La réponse terrestre d’Israël est la mise en service d’un nouvel engin blindé, le Carmel. Char léger biplace, il révolutionne la notion d’engin principal pour une armée. Les Israéliens ont imaginé un engin qui tourne autour de quelques idées

La communication est un élément important. Le char fait partie d’un réseau d’information couplant des systèmes de systèmes informant l’équipage de la situation tactique le plus précisément possible. L’information est exploitée par l’équipage par fusion des données sur des écrans grand format ou des casques digitaux. Mais il communique aussi avec le véhicule qui dispose d’une intelligence artificielle.

L’IA est la nouveauté de l’engin. Elle aide l’homme a traiter les informations plus rapidement, accélère les comptes rendus automatiques et la réaction aux menaces. L'intelligence artificielle peut aider à identifier des véhicules, à viser de multiples cibles. Le char peut ainsi réagir de manière autonome contre une menace urgente. On peut imaginer aussi une coopération de systèmes opérant à distance. Par exemple, un ami pourrait demander un tir du véhicule sans intervention de l’équipage. Il permet le pilotage du véhicule laissant l’équipage à la tâche principale qui est le combat.

L’IA permet de réduire l’équipage à deux hommes, ainsi ont réduit le nombre de personnels exposés au feu. L’équipage est placé dans une cellule de survie dans la caisse derrière le groupe motopropulseur hybride. Le train de roulement est à chenille alors que la masse de l’engin est d’environ 30 tonnes. Dans le domaine du blindage, il n’y a pas de grande révolution : le véhicule est protégé par un blindage composite couplé avec le système Trophy. La vraie nouveauté est donc cette protection informationnelle et distancielle obtenue grâce à l’IA et les moyens de communication.

Autre nouveauté du char, la mise en œuvre d’une motorisation hybride avec un stock important d’énergie immédiatement disponible grâce à des accumulateurs et des batteries haute puissance qui permettent à l’engin de délivrer des accélérations puissantes (aussi fortes qu’une voiture de course) mais aussi des coup de frein très violents qui permettent à l’engin de sortir de la zone d’impact des roquettes d’infanterie (environ 450m)  comme des obus flèches de char (a minimum 1500 m ).Cette capacité nouvelle de protection a été théorisée et testée par le véhicule haute mobilité GXV-T de la DARPA. Couplé à un système de capteur et à l’IA, il permet à l’engin de réagir à toute menace par évitement. C'est une méthode bien plus simple et pratique pour éviter un tir.

L’armement est tél- opéré. Il comprend un canon de 30 mm, des mitrailleuses et des missiles capables d’effectuer des tirs de manière autonome. Les missiles permettent des TADV en roulant. Les Israéliens ont déjà choisi la vidéo comme moyen d’observation sur  le  Merkava. Ce choix est reconduit sur le Carmel. Les écrans télé permettent d’avoir une vision rapide de l’environnement autour du véhicule. Le char intègre aussi le casque Vision qui permet de voir à travers le blindage. Le canon mitrailleur, lui, est idéal contre les cibles molles et les drones. On peut imaginer que le radar du Trophy puisse aider au repérage et au pointage du canon. Le canon peut être coordonné par un autre système.

L’engin est prévu pour remplacer le Merkava avec un taux de change de deux pour un. Les Israéliens densifient ainsi leurs forces, ce qui leur permet d’être plus résilients sans augmentation importante du budget. Les engins plus légers s’intègrent mieux dans l’environnement urbain des villes de cette région. devant être en mesure d’affronter des adversaires sur de multiples fronts.   

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